LE LYCÉE TECHNIQUE DE RUISSEAU
Ma génération de la classe de troisième du collège d'Affreville (département d'Orléansville) a eu le privilège de faire partie de la première promotion ayant passé le brevet dans l'Algérie indépendante à Affreville, plus précisément les deux brevets, héritages de la culture française. Le premier étant le B.E.P.C Brevet Élémentaire du Premier Cycle et le second B.E s'intitulant Brevet de Capacité pour l'Enseignement Primaire .Bien que le second n'étant pas obligatoire, il représentait par contre un niveau plus élevé et permettait à son possesseur d'enseigner dans une école primaire. Notre classe était mixte et nous représentions tout au plus une vingtaine d'élèves, filles et garçons. La plupart des enseignants français partis après le cessez-le feu, c'était monsieur Yahi qui nous enseignais la plupart des matières, et la fin de l'année fût couronnée de cent pour cent de succès pour le B.E.P.C et de quatre vingt pour cent en ce qui concerne le Brevet Élémentaire. Les vacances d'été qui ont suivi nous ont permis d'avoir le temps de nous inscrire dans l'établissement de notre choix. Le destin voulût que le lycée technique de Ruisseau à Alger fasse une annonce à l'échelle nationale et c'est Haouache, l'un de mes camarades de classe qui m'en informa. Haouache était orphelin de père et faisait ses devoirs toute l'année sous la lumière des bougies, mais il était toujours classé premier de la classe. Amriou le camarade que je fréquentais le plus régulièrement grâce aux romans policiers que nous échangions , accepta également d'en faire partie et nous sommes allés à la poste, avec un franc envoyer le télégramme de confirmation.
Pour les élèves n'habitant pas l'algérois le régime instauré dans ce lycée était l'internat et nous devions prévoir un trousseau. Mon père étant absent à cette période, chargea monsieur Amriou père de s'occuper de l'achat des deux trousseaux. Le jour de la rentrée quelle ne fût pas ma surprise de constater que mon ami portait exactement les même vêtements que les miens. Monsieur Amriou ne trouva pas mieux que de nous cloner avec des vêtement identiques, jusqu'aux sous-vêtements et chaussettes tant qu'au lycée on nous a pris pour des jumeaux. Habitués aux libertés, nous mettrons longtemps à nous accoutumer au régime disciplinaire et restrictif de l'internat. Mon problème ce n'était pas le réveil tôt le matin, mais l'extinction des lumières le soir à une heure fixe qui a perturbée mon habitude de lire avant de dormir. Après réflexion j'ai pensé utiliser une torche électrique pour finir mes épisodes, mais je me faisais souvent prendre par les surveillants, et les coups pleuvaient. Les meilleurs moments du dortoir, c'étaient le soir où il y avait un match de football de l'équipe nationale au stade du Ruisseau .Nos fenêtres donnaient directement sur le stade et on se régalait lorsqu'il y avait un match car on nous autorisait ces soirs-là de nous coucher plus tard.
En ce qui concernait les repas, nous avions un grand réfectoire et c'était pour nous le meilleur moment de la journée. Nous étions six par table, et c'était moi qui étais toujours désigné chef de table toute l'année. Moi ,ça ne me gênait pas, au contraire cela me donnait des privilèges .A ce sujet je me suis toujours demandé pour quelle raison on me choisissait chaque fois pour cette fonction, chef d'équipe, chef de classe, chef de poste et même dans ma famille je suis l'aîné. Pourtant dans ma classe, j'étais le plus jeune de tous depuis que M. Berzane instituteur de la classe du cours élémentaire de l'école Lafayette m'a fait passer directement au CM1 parce que toute l'année que j'ai passée avec lui, je n'avais jamais eu moins de 10, ni en devoirs ni en compositions et grâce à cette performance on me fit sauter la classe de CE2. En réalité j'étais personnellement beaucoup plus content d'éviter M. Djouaher le directeur de l'école et même temps instituteur à la classe de CE2. M. Djouaher était craint de tous les élèves à cause de sa grande sévérité. Donc au réfectoire mes compagnons de table étaient bien contents de m'avoir avec eux, parce que grâce à moi ils mangeaient tous les jours une ration de plus .Ma place était toujours au bout de la table du coté du passage du chariot qui ramenait les plateaux de nourriture, et c'était moi qui distribuais les parts .Ma stratégie était simple: lorsque le chariot arrivait à ma hauteur , j'attendais que l'employé se tourne pour servir la rangée d'en face, je prenais rapidement un plateau et je le faisais passer sous la table de façon à ce que mes camarades le tiennent discrètement en attendant qu'on nous serve notre part .Ainsi notre table avait une double ration toute l'année et lorsque je débarquais à la maison ma mère me disait "Tu as bonne mine, l'internat te va bien.
Au lycée ,notre emploi du temps comptait huit heures de cours par jour contrairement aux autres établissements qui n'en avaient que six. Outre les matières classiques, on étudiait le dessin industriel et on apprenait aussi à utiliser à l'atelier les machines outils, tels le fraisage, le tournage, la chaudronnerie, la menuiserie et même la forge. Moi ce que j'aimais le plus c'était les cours de français et de physique-chimie, matières dans lesquelles j'excellais. Peut-être était-ce dû aux professeurs et à leur méthode . Grace à mes grandes aptitudes en physique-chimie, le professeur M. Dahen qui était juif m'estimait tellement qu'il me traitait comme un ami. Pour les expériences pratiques c'était toujours à moi qu'il faisait appel.Il possédait une 2 CV camionnette et chaque fois que j'avais cours avec lui en fin de journée, il me faisait monter discrètement à l'arrière de son véhicule et me déposait en dehors du lycée. Cela me donnait l'occasion de changer les idées, je m'attablais dans un café ou bien j'allais me promener quelque part. Le plus difficile était le retour parce que je devais passer par la surveillance .La clôture du lycée était faite de barreaux métalliques, mais en cherchant minutieusement je suis arrivé un jour à trouver une ouverture ce qui me permettait à chaque fois de regagner le lycée discrètement. Malheureusement un jour je fus repéré par un surveillant qui a couru après moi, heureusement sans me rattraper et depuis on a fermé ce passage ce qui m'a enlevé tout espoir de promenade . Plus tard ma vie professionnelle aura été en grande partie influencée par M. Dahen grâce aux méthodes avec lesquelles il nous a fait aimer les sciences physiques.
En fin de journée après les cours, les internes avaient droit à un goûter constitué d'un bout de pain et d'un morceau de chocolat, et avant le dîner, nous rejoignions les salles d'études pour faire nos devoirs. Pour ma part j'étais passionné par la correspondance, d'abord parce que j'aimais beaucoup écrire (jusqu'à présent), ensuite c'était le seul moyen pour nous de communiquer avec des personnes en dehors du pays .Comme nous n'avions pas la presse étrangère et encore moins les revues, il fallait trouver des stratagèmes pour enrichir notre quotidien culturel. La correspondance pour nous c'était un pont virtuel qui nous permettait d'échanger et d'avoir l'occasion de connaitre les us et coutumes de citoyens d'autres continents, un partage mutuel, instinctif et sans préjugé. Oui, mais comment trouver des contacts qui vous font confiance pour tisser des relations d'amitié ou au moins d'échanges. Après des recherches, j'ai réussi à découvrir une formule payante à l'étranger, mais comment payer ? Je suis donc allé à la poste pour essayer d'avoir des informations à ce sujet et finalement j'ai réussi à trouver la solution à mon idée. J'ai pu savoir qu'une contrepartie financière pouvait se faire avec des timbres postaux, puisque ceux-ci avaient une valeur financière. Evidemment je parle du temps ou notre monnaie était encore en Francs. Les responsables de cette transaction offraient comme bonus une correspondance gratuite pour deux payées. De cette manière, je me suis mis à inscrire les internes qui étaient bien contents, et par ce fait j'ai réussi à avoir pour mon compte plusieurs correspondantes gratuites. Mais vu le temps que cela prenait pour écrire, je me suis limité à un maximum de quatre : une française, une belge, une hollandaise et une allemande dont leurs photos sont conservées jusqu'à présent .
Il ne faut pas négliger non plus l'usage des distractions tel le sport, pour lequel j'avais de bonnes aptitudes ce qui me permettait de participer à des compétions locales et nationales dans le domaine de l'athlétisme dans lequel j'obtenais de bons résultats sans entraînement préalable. Je représentais aussi un assez bon gardien de but (héritage du collège d'Affreville), que ce soit en handball ou en football. Dans le lycée-même nous possédions un véritable stade de football .Nous avions aussi une salle de cinéma où on avait droit tous les jeudi soir, à la projection d'un film suivi d'un débat dirigé par le professeur de français. Ah, j'allais oublier une activité qui faisait partie de nos divertissements. Bien que pour les responsables cela représentait une corvée, pour nous et particulièrement les internes, on y trouvait un moyen de distraction. Pendant la période du printemps, il y avait ce qu'on appelait la campagne de reboisement .Théoriquement c'était considéré comme un volontariat, mais en réalité, on ne nous demandait par notre avis. Cela consistait à nous emmener les dimanches (journée fériée de l'époque) dans la forêt pour planter des arbres et vu que les autobus étaient rares, on nous transportait à l'arrière de camions. Mais il y avait une bonne ambiance et pour nous c'était une occasion de défoulement d'autant plus que c'était mixte et après plusieurs jours d'enfermement à l'internat nous étions bien contents d'engager des discussions enrichissantes tout en plantant des arbres.
Dans le domaine de la discipline, le seul handicap était le lundi matin, premier jour de la semaine. Avant j'allais sur Alger le vendredi soir et je passais la nuit chez ma tante qui habite rue du Docteur Bureau , pas très loin du Ruisseau, en montant vers Kouba et le lendemain je me présentais à l'heure .Seulement je n'ai plus 'utilisé cet méthode suite à un incident. D'habitude je prends le train et j'arrive le soir chez ma tante, mais un jour, je l'ai trouvée absente et comme je n'avais pas le choix oü aller, je décidais de passer la nuit dehors sur le perron de la porte. En général je ramenais avec moi le linge lavé, et en regardant dans mon cabas j'eus la chance de trouver un drap. Je me suis donc allongé sur la marche devant la porte et comme il faisait un peu frais, je me couvris avec le drap. C'était une ruelle mal éclairée, mais contrairement à nos jours, il n'existait pas de gens mal intentionnés .Au moment ou mes yeux commençaient à se fermer, j'entendis des pas ,c'était quelqu'un qui montait la ruelle tout en chantonnant et cela se voyait qu'il était saoul. Alors je me suis allongé sur le perron en me couvrant entièrement avec le drap blanc tout en épiant d'un œil son comportement. J'ai encore en mémoire l' image dans ma tête. Au moment où il est arrivé à ma hauteur et qu'il m'aperçut, il fit brusquement demi-tour et détala à toute vitesse .
Cet événement me rappelle justement une autre circonstance, mais beaucoup plus drôle (en tout cas pour moi) et ayant le mérite d'être rapporté. Juste après le cessez-le-feu signé par l'Algérie et la France en mars 1962 , alors que je trouvais devant la maison, en compagnie de mon ami Miloudi, lui aussi bon guitariste mais vivant depuis aux Etats-Unis. Des voisins du quartier nous ont accosté et nous ont tenu ce langage: "Mes amis l'heure est grave et le pays a besoin de volontaires pour surveiller la nuit certains quartiers de la ville . Pensant qu'on allait nous confier la responsabilité de notre quartier, nous avons accepté mais quelle fut notre surprise lorsqu'ils nous ont indiqué le cimetière comme lieu de notre mission. Mon ami et moi ne pouvant retirer notre parole pour une responsabilité aussi patriotique que de surveiller les morts, nous avons acquiescé puisque de toutes les façons il nous arrivait souvent de passer la nuit dehors avec nos guitares et à fortiori nous savions pertinemment que les morts plus inoffensifs que les vivants .Une fois la nuit venue nous avons pris de quoi manger ainsi que quelques draps et nous sommes montés au cimetière situé à l'extrémité nord de la ville. Le ciel était clair et il régnait un silence apaisant.Cela ne pourrait être autrement, me diriez-vous .La présence d'un ami fait qu'on ne sent pas le temps passer, et les sujets de conversation ne tarissent pas, grâce à notre une sincère amitié. Mais au cours de nos discussions il me vint tout à une idée que j'exposai à mon camarade. Le secrétaire de l'inspecteur et professeur monsieur Yahi habitait près du cimetière, et je savais que c'était son trajet habituel pour rentrer chez lui, puisqu'en général monsieur Yahi le libère assez tard. Effectivement au bout d'un moment il ne tarda pas à se montrer et on le vit traverser le cimetière d'un pas vif et léger puisqu'il y était habitué .Il se dirigea vers notre direction et dès qu'il fût assez proche , nous nous couvrîmes tous les deux des draps blancs que nous avions ramenés avec nous et à l'unisson nous nous levâmes brusquement en gesticulant dans tous les sens. La scène qui s'ensuivit restera toujours vivante dans nos mémoires .Il se mit à courir de toutes ses forces et dans tous les sens en piétinant les morts et les témoins des tombes sur son passage. Cet intermède nous a complètement fait oublier notre solitude jusqu'au matin. Le lendemain nous sommes allés rendre visite à notre victime à son bureau. Ses jambes étaient complètement ensanglantées et il nous a répondu que c'était le cyclomoteur qui lui avait fait ça. Que Dieu nous pardonne.
Donc depuis cette nuit passée sur le perron de ma tante, j'ai décidé de changer d'horaire pour les rentrées du week-end quitte à me faire des remontrances de la part du surveillant général. À cette époque, il n'y avait ni train et encore moins un bus qui arrivaient tôt le matin à Alger. L'inspecteur de l'école primaire monsieur Bounadja, chez lequel mon père occupait le poste de secrétaire général, faisait la navette tous les lundi matin sur la capitale et lorsqu'il me proposa de me prendre avec lui chaque semaine, j'ai accepté. Il possédait une vieille Citröen Ami8 qui atteignait difficilement les aux soixante kilomètres à l'heure.Comme il ne démarrait pas très tôt, tous les lundi j'arrivais en retard au lycée où je retrouvais monsieur Chanu le surveillant général qui m'attendait à l'entrée : « Alors Ettaieb, encore en retard ? ». Un de ces matins, excédé , il me barra le passage et m'apostropha : «Ettaieb reviens d'où tu viens ! ». Je ne me le suis pas fait répéter deux fois, seulement je ne suis pas revenu d'où je suis venu , mais je suis allé directement chez ma tante . Ma tante Zoubida m'aimait beaucoup et ne me posait habituellement jamais de questions indiscrètes .Elle fut très contente que je restai chez elle. Bien que son mari de son vivant lui avait construit une grande villa à Ain-Defla ou elle a toute sa famille, elle est retournée vivre dans le quartier de Kouba , dans son deux-pièces aménagé. Lorsque monsieur Chanu a vu que je tardais à revenir au lycée, il appela mon père à l'inspection qui lui a répondu ne pas m'avoir pas vu depuis le lundi passé .M. Chanu ayant une responsabilité sur les internes même en retard, fut pris d'un dépourvu et alors s'ensuivit une alerte pour me retrouver. Pour ma part, j'étais bien content d'être chez ma tante qui ne se doutait de rien et me couvait de beaucoup de gâteries. Après plusieurs journées de grève, je décidai finalement de retourner au lycée. Monsieur Chanu soulagé de me revoir sain et sauf ne me posa pas de questions et depuis, mes retards ne furent plus sanctionnés.
Si on peut conclure à ce petit aperçu qui a précédé, c'est avant tout le triste constat de notre régression scolaire et culturelle qui a suivi quelques années après l'indépendance. On ne pourra jamais nier que la puissance colonisatrice nous a laissé un héritage de grande valeur, une langue, un savoir ,une histoire et beaucoup de constructions. Si nous l'avions immédiatement effacé, nous n'aurions jamais eu les premières générations qui ont continué à gérer le pays en période poste indépendante .En ce qui concerne les sciences et les technologies la langue de communication a son importance, parce qu'un pays ne peut progresser en effaçant les connaissances, la technologie et la langue. Piétiner tout un patrimoine bâti pendant de longues années ,en contrepartie d'aventures hasardeuses et sans un plan spécifique expérimental, nous a immédiatement fait chuter des sommets que nous avions atteints pour aller nager (ou plutôt nous noyer) dans la médiocrité. Il faudrait avant tout reconnaître l'échec des résultats actuels de notre politique scolaire qui est à la merci d'aventuriers par des décisions unilatérales, et utilisée comme un champ d'expérimentation continue sur nos enfants. Du primaire à l'université, combien de changements des programmes avec leurs supports ont-ils été effectués ? Pas de consultations réciproques auprès d'experts étrangers ni même du pays, pas de tests de simulation des programmes avant leur utilisation, bref des théories inopinés variant d'un ministre à un autre et faisant fi de la déperdition scolaire qui s'en est suivie.Ces programmes scolaires ne sont pas les seuls en cause, mais également le choix de la pédagogie ainsi que le manque de formation continue des enseignants à qui, sans leur jeter l'opprobre, on a inculqué un métier à créer des robots soumis. Pour quelles raisons a-t-on cru bon de supprimer la formule du baccalauréat en deux parties qui était plus abordable en gardant les même valeurs ? C'est-a-dire la première session du bac en classe de seconde et la deuxième session en terminale. D'abord la charge des matières et du programme du baccalauréat seraient diminuées de moitié, secundo l'élève pourrait avoir l'occasion d'améliorer ses notes ou se rattraper en deuxième session, sans citer les autres problèmes de stress et de surmenage. Nul n'ignore qu'à des fins électorales les résultats du bac sont gonflés mais l'on constate malheureusement aussi que notre pays possède actuellement six millions de citoyens qui ne savent ni lire ni écrire, soit un taux d'analphabétisme de 22%, selon les résultats d'une étude publiée dans la presse.Mais c'est peut-être aussi le but recherché?
Collège Victor Hugo Affreville (Algérie) Classe de 3e 1961
À gauche M.Yahi professeur de Sciences et de mathématiques À droite M. Dornier professeur de français
Au dortoir du lycée
Létude
Au volontariat
Ma génération de la classe de troisième du collège d'Affreville (département d'Orléansville) a eu le privilège de faire partie de la première promotion ayant passé le brevet dans l'Algérie indépendante à Affreville, plus précisément les deux brevets, héritages de la culture française. Le premier étant le B.E.P.C Brevet Élémentaire du Premier Cycle et le second B.E s'intitulant Brevet de Capacité pour l'Enseignement Primaire .Bien que le second n'étant pas obligatoire, il représentait par contre un niveau plus élevé et permettait à son possesseur d'enseigner dans une école primaire. Notre classe était mixte et nous représentions tout au plus une vingtaine d'élèves, filles et garçons. La plupart des enseignants français partis après le cessez-le feu, c'était monsieur Yahi qui nous enseignais la plupart des matières, et la fin de l'année fût couronnée de cent pour cent de succès pour le B.E.P.C et de quatre vingt pour cent en ce qui concerne le Brevet Élémentaire. Les vacances d'été qui ont suivi nous ont permis d'avoir le temps de nous inscrire dans l'établissement de notre choix. Le destin voulût que le lycée technique de Ruisseau à Alger fasse une annonce à l'échelle nationale et c'est Haouache, l'un de mes camarades de classe qui m'en informa. Haouache était orphelin de père et faisait ses devoirs toute l'année sous la lumière des bougies, mais il était toujours classé premier de la classe. Amriou le camarade que je fréquentais le plus régulièrement grâce aux romans policiers que nous échangions , accepta également d'en faire partie et nous sommes allés à la poste, avec un franc envoyer le télégramme de confirmation.
Pour les élèves n'habitant pas l'algérois le régime instauré dans ce lycée était l'internat et nous devions prévoir un trousseau. Mon père étant absent à cette période, chargea monsieur Amriou père de s'occuper de l'achat des deux trousseaux. Le jour de la rentrée quelle ne fût pas ma surprise de constater que mon ami portait exactement les même vêtements que les miens. Monsieur Amriou ne trouva pas mieux que de nous cloner avec des vêtement identiques, jusqu'aux sous-vêtements et chaussettes tant qu'au lycée on nous a pris pour des jumeaux. Habitués aux libertés, nous mettrons longtemps à nous accoutumer au régime disciplinaire et restrictif de l'internat. Mon problème ce n'était pas le réveil tôt le matin, mais l'extinction des lumières le soir à une heure fixe qui a perturbée mon habitude de lire avant de dormir. Après réflexion j'ai pensé utiliser une torche électrique pour finir mes épisodes, mais je me faisais souvent prendre par les surveillants, et les coups pleuvaient. Les meilleurs moments du dortoir, c'étaient le soir où il y avait un match de football de l'équipe nationale au stade du Ruisseau .Nos fenêtres donnaient directement sur le stade et on se régalait lorsqu'il y avait un match car on nous autorisait ces soirs-là de nous coucher plus tard.
En ce qui concernait les repas, nous avions un grand réfectoire et c'était pour nous le meilleur moment de la journée. Nous étions six par table, et c'était moi qui étais toujours désigné chef de table toute l'année. Moi ,ça ne me gênait pas, au contraire cela me donnait des privilèges .A ce sujet je me suis toujours demandé pour quelle raison on me choisissait chaque fois pour cette fonction, chef d'équipe, chef de classe, chef de poste et même dans ma famille je suis l'aîné. Pourtant dans ma classe, j'étais le plus jeune de tous depuis que M. Berzane instituteur de la classe du cours élémentaire de l'école Lafayette m'a fait passer directement au CM1 parce que toute l'année que j'ai passée avec lui, je n'avais jamais eu moins de 10, ni en devoirs ni en compositions et grâce à cette performance on me fit sauter la classe de CE2. En réalité j'étais personnellement beaucoup plus content d'éviter M. Djouaher le directeur de l'école et même temps instituteur à la classe de CE2. M. Djouaher était craint de tous les élèves à cause de sa grande sévérité. Donc au réfectoire mes compagnons de table étaient bien contents de m'avoir avec eux, parce que grâce à moi ils mangeaient tous les jours une ration de plus .Ma place était toujours au bout de la table du coté du passage du chariot qui ramenait les plateaux de nourriture, et c'était moi qui distribuais les parts .Ma stratégie était simple: lorsque le chariot arrivait à ma hauteur , j'attendais que l'employé se tourne pour servir la rangée d'en face, je prenais rapidement un plateau et je le faisais passer sous la table de façon à ce que mes camarades le tiennent discrètement en attendant qu'on nous serve notre part .Ainsi notre table avait une double ration toute l'année et lorsque je débarquais à la maison ma mère me disait "Tu as bonne mine, l'internat te va bien.
Au lycée ,notre emploi du temps comptait huit heures de cours par jour contrairement aux autres établissements qui n'en avaient que six. Outre les matières classiques, on étudiait le dessin industriel et on apprenait aussi à utiliser à l'atelier les machines outils, tels le fraisage, le tournage, la chaudronnerie, la menuiserie et même la forge. Moi ce que j'aimais le plus c'était les cours de français et de physique-chimie, matières dans lesquelles j'excellais. Peut-être était-ce dû aux professeurs et à leur méthode . Grace à mes grandes aptitudes en physique-chimie, le professeur M. Dahen qui était juif m'estimait tellement qu'il me traitait comme un ami. Pour les expériences pratiques c'était toujours à moi qu'il faisait appel.Il possédait une 2 CV camionnette et chaque fois que j'avais cours avec lui en fin de journée, il me faisait monter discrètement à l'arrière de son véhicule et me déposait en dehors du lycée. Cela me donnait l'occasion de changer les idées, je m'attablais dans un café ou bien j'allais me promener quelque part. Le plus difficile était le retour parce que je devais passer par la surveillance .La clôture du lycée était faite de barreaux métalliques, mais en cherchant minutieusement je suis arrivé un jour à trouver une ouverture ce qui me permettait à chaque fois de regagner le lycée discrètement. Malheureusement un jour je fus repéré par un surveillant qui a couru après moi, heureusement sans me rattraper et depuis on a fermé ce passage ce qui m'a enlevé tout espoir de promenade . Plus tard ma vie professionnelle aura été en grande partie influencée par M. Dahen grâce aux méthodes avec lesquelles il nous a fait aimer les sciences physiques.
En fin de journée après les cours, les internes avaient droit à un goûter constitué d'un bout de pain et d'un morceau de chocolat, et avant le dîner, nous rejoignions les salles d'études pour faire nos devoirs. Pour ma part j'étais passionné par la correspondance, d'abord parce que j'aimais beaucoup écrire (jusqu'à présent), ensuite c'était le seul moyen pour nous de communiquer avec des personnes en dehors du pays .Comme nous n'avions pas la presse étrangère et encore moins les revues, il fallait trouver des stratagèmes pour enrichir notre quotidien culturel. La correspondance pour nous c'était un pont virtuel qui nous permettait d'échanger et d'avoir l'occasion de connaitre les us et coutumes de citoyens d'autres continents, un partage mutuel, instinctif et sans préjugé. Oui, mais comment trouver des contacts qui vous font confiance pour tisser des relations d'amitié ou au moins d'échanges. Après des recherches, j'ai réussi à découvrir une formule payante à l'étranger, mais comment payer ? Je suis donc allé à la poste pour essayer d'avoir des informations à ce sujet et finalement j'ai réussi à trouver la solution à mon idée. J'ai pu savoir qu'une contrepartie financière pouvait se faire avec des timbres postaux, puisque ceux-ci avaient une valeur financière. Evidemment je parle du temps ou notre monnaie était encore en Francs. Les responsables de cette transaction offraient comme bonus une correspondance gratuite pour deux payées. De cette manière, je me suis mis à inscrire les internes qui étaient bien contents, et par ce fait j'ai réussi à avoir pour mon compte plusieurs correspondantes gratuites. Mais vu le temps que cela prenait pour écrire, je me suis limité à un maximum de quatre : une française, une belge, une hollandaise et une allemande dont leurs photos sont conservées jusqu'à présent .
Il ne faut pas négliger non plus l'usage des distractions tel le sport, pour lequel j'avais de bonnes aptitudes ce qui me permettait de participer à des compétions locales et nationales dans le domaine de l'athlétisme dans lequel j'obtenais de bons résultats sans entraînement préalable. Je représentais aussi un assez bon gardien de but (héritage du collège d'Affreville), que ce soit en handball ou en football. Dans le lycée-même nous possédions un véritable stade de football .Nous avions aussi une salle de cinéma où on avait droit tous les jeudi soir, à la projection d'un film suivi d'un débat dirigé par le professeur de français. Ah, j'allais oublier une activité qui faisait partie de nos divertissements. Bien que pour les responsables cela représentait une corvée, pour nous et particulièrement les internes, on y trouvait un moyen de distraction. Pendant la période du printemps, il y avait ce qu'on appelait la campagne de reboisement .Théoriquement c'était considéré comme un volontariat, mais en réalité, on ne nous demandait par notre avis. Cela consistait à nous emmener les dimanches (journée fériée de l'époque) dans la forêt pour planter des arbres et vu que les autobus étaient rares, on nous transportait à l'arrière de camions. Mais il y avait une bonne ambiance et pour nous c'était une occasion de défoulement d'autant plus que c'était mixte et après plusieurs jours d'enfermement à l'internat nous étions bien contents d'engager des discussions enrichissantes tout en plantant des arbres.
Dans le domaine de la discipline, le seul handicap était le lundi matin, premier jour de la semaine. Avant j'allais sur Alger le vendredi soir et je passais la nuit chez ma tante qui habite rue du Docteur Bureau , pas très loin du Ruisseau, en montant vers Kouba et le lendemain je me présentais à l'heure .Seulement je n'ai plus 'utilisé cet méthode suite à un incident. D'habitude je prends le train et j'arrive le soir chez ma tante, mais un jour, je l'ai trouvée absente et comme je n'avais pas le choix oü aller, je décidais de passer la nuit dehors sur le perron de la porte. En général je ramenais avec moi le linge lavé, et en regardant dans mon cabas j'eus la chance de trouver un drap. Je me suis donc allongé sur la marche devant la porte et comme il faisait un peu frais, je me couvris avec le drap. C'était une ruelle mal éclairée, mais contrairement à nos jours, il n'existait pas de gens mal intentionnés .Au moment ou mes yeux commençaient à se fermer, j'entendis des pas ,c'était quelqu'un qui montait la ruelle tout en chantonnant et cela se voyait qu'il était saoul. Alors je me suis allongé sur le perron en me couvrant entièrement avec le drap blanc tout en épiant d'un œil son comportement. J'ai encore en mémoire l' image dans ma tête. Au moment où il est arrivé à ma hauteur et qu'il m'aperçut, il fit brusquement demi-tour et détala à toute vitesse .
Cet événement me rappelle justement une autre circonstance, mais beaucoup plus drôle (en tout cas pour moi) et ayant le mérite d'être rapporté. Juste après le cessez-le-feu signé par l'Algérie et la France en mars 1962 , alors que je trouvais devant la maison, en compagnie de mon ami Miloudi, lui aussi bon guitariste mais vivant depuis aux Etats-Unis. Des voisins du quartier nous ont accosté et nous ont tenu ce langage: "Mes amis l'heure est grave et le pays a besoin de volontaires pour surveiller la nuit certains quartiers de la ville . Pensant qu'on allait nous confier la responsabilité de notre quartier, nous avons accepté mais quelle fut notre surprise lorsqu'ils nous ont indiqué le cimetière comme lieu de notre mission. Mon ami et moi ne pouvant retirer notre parole pour une responsabilité aussi patriotique que de surveiller les morts, nous avons acquiescé puisque de toutes les façons il nous arrivait souvent de passer la nuit dehors avec nos guitares et à fortiori nous savions pertinemment que les morts plus inoffensifs que les vivants .Une fois la nuit venue nous avons pris de quoi manger ainsi que quelques draps et nous sommes montés au cimetière situé à l'extrémité nord de la ville. Le ciel était clair et il régnait un silence apaisant.Cela ne pourrait être autrement, me diriez-vous .La présence d'un ami fait qu'on ne sent pas le temps passer, et les sujets de conversation ne tarissent pas, grâce à notre une sincère amitié. Mais au cours de nos discussions il me vint tout à une idée que j'exposai à mon camarade. Le secrétaire de l'inspecteur et professeur monsieur Yahi habitait près du cimetière, et je savais que c'était son trajet habituel pour rentrer chez lui, puisqu'en général monsieur Yahi le libère assez tard. Effectivement au bout d'un moment il ne tarda pas à se montrer et on le vit traverser le cimetière d'un pas vif et léger puisqu'il y était habitué .Il se dirigea vers notre direction et dès qu'il fût assez proche , nous nous couvrîmes tous les deux des draps blancs que nous avions ramenés avec nous et à l'unisson nous nous levâmes brusquement en gesticulant dans tous les sens. La scène qui s'ensuivit restera toujours vivante dans nos mémoires .Il se mit à courir de toutes ses forces et dans tous les sens en piétinant les morts et les témoins des tombes sur son passage. Cet intermède nous a complètement fait oublier notre solitude jusqu'au matin. Le lendemain nous sommes allés rendre visite à notre victime à son bureau. Ses jambes étaient complètement ensanglantées et il nous a répondu que c'était le cyclomoteur qui lui avait fait ça. Que Dieu nous pardonne.
Donc depuis cette nuit passée sur le perron de ma tante, j'ai décidé de changer d'horaire pour les rentrées du week-end quitte à me faire des remontrances de la part du surveillant général. À cette époque, il n'y avait ni train et encore moins un bus qui arrivaient tôt le matin à Alger. L'inspecteur de l'école primaire monsieur Bounadja, chez lequel mon père occupait le poste de secrétaire général, faisait la navette tous les lundi matin sur la capitale et lorsqu'il me proposa de me prendre avec lui chaque semaine, j'ai accepté. Il possédait une vieille Citröen Ami8 qui atteignait difficilement les aux soixante kilomètres à l'heure.Comme il ne démarrait pas très tôt, tous les lundi j'arrivais en retard au lycée où je retrouvais monsieur Chanu le surveillant général qui m'attendait à l'entrée : « Alors Ettaieb, encore en retard ? ». Un de ces matins, excédé , il me barra le passage et m'apostropha : «Ettaieb reviens d'où tu viens ! ». Je ne me le suis pas fait répéter deux fois, seulement je ne suis pas revenu d'où je suis venu , mais je suis allé directement chez ma tante . Ma tante Zoubida m'aimait beaucoup et ne me posait habituellement jamais de questions indiscrètes .Elle fut très contente que je restai chez elle. Bien que son mari de son vivant lui avait construit une grande villa à Ain-Defla ou elle a toute sa famille, elle est retournée vivre dans le quartier de Kouba , dans son deux-pièces aménagé. Lorsque monsieur Chanu a vu que je tardais à revenir au lycée, il appela mon père à l'inspection qui lui a répondu ne pas m'avoir pas vu depuis le lundi passé .M. Chanu ayant une responsabilité sur les internes même en retard, fut pris d'un dépourvu et alors s'ensuivit une alerte pour me retrouver. Pour ma part, j'étais bien content d'être chez ma tante qui ne se doutait de rien et me couvait de beaucoup de gâteries. Après plusieurs journées de grève, je décidai finalement de retourner au lycée. Monsieur Chanu soulagé de me revoir sain et sauf ne me posa pas de questions et depuis, mes retards ne furent plus sanctionnés.
Si on peut conclure à ce petit aperçu qui a précédé, c'est avant tout le triste constat de notre régression scolaire et culturelle qui a suivi quelques années après l'indépendance. On ne pourra jamais nier que la puissance colonisatrice nous a laissé un héritage de grande valeur, une langue, un savoir ,une histoire et beaucoup de constructions. Si nous l'avions immédiatement effacé, nous n'aurions jamais eu les premières générations qui ont continué à gérer le pays en période poste indépendante .En ce qui concerne les sciences et les technologies la langue de communication a son importance, parce qu'un pays ne peut progresser en effaçant les connaissances, la technologie et la langue. Piétiner tout un patrimoine bâti pendant de longues années ,en contrepartie d'aventures hasardeuses et sans un plan spécifique expérimental, nous a immédiatement fait chuter des sommets que nous avions atteints pour aller nager (ou plutôt nous noyer) dans la médiocrité. Il faudrait avant tout reconnaître l'échec des résultats actuels de notre politique scolaire qui est à la merci d'aventuriers par des décisions unilatérales, et utilisée comme un champ d'expérimentation continue sur nos enfants. Du primaire à l'université, combien de changements des programmes avec leurs supports ont-ils été effectués ? Pas de consultations réciproques auprès d'experts étrangers ni même du pays, pas de tests de simulation des programmes avant leur utilisation, bref des théories inopinés variant d'un ministre à un autre et faisant fi de la déperdition scolaire qui s'en est suivie.Ces programmes scolaires ne sont pas les seuls en cause, mais également le choix de la pédagogie ainsi que le manque de formation continue des enseignants à qui, sans leur jeter l'opprobre, on a inculqué un métier à créer des robots soumis. Pour quelles raisons a-t-on cru bon de supprimer la formule du baccalauréat en deux parties qui était plus abordable en gardant les même valeurs ? C'est-a-dire la première session du bac en classe de seconde et la deuxième session en terminale. D'abord la charge des matières et du programme du baccalauréat seraient diminuées de moitié, secundo l'élève pourrait avoir l'occasion d'améliorer ses notes ou se rattraper en deuxième session, sans citer les autres problèmes de stress et de surmenage. Nul n'ignore qu'à des fins électorales les résultats du bac sont gonflés mais l'on constate malheureusement aussi que notre pays possède actuellement six millions de citoyens qui ne savent ni lire ni écrire, soit un taux d'analphabétisme de 22%, selon les résultats d'une étude publiée dans la presse.Mais c'est peut-être aussi le but recherché?
Collège Victor Hugo Affreville (Algérie) Classe de 3e 1961
À gauche M.Yahi professeur de Sciences et de mathématiques À droite M. Dornier professeur de français
Au dortoir du lycée
Létude
Au volontariat
Pour quelle raison y-a-il une place pour les commentaires destinées aux lecteurs ?On ne doit pas en vouloir aux personnes qui ne laissent pas de commentaires, c'est une liberté personnelle. Seulement il faudrait que ces gens sachent qu'un commentaire n'est pas essentiellement destiné à flatter l'auteur du texte, mais au contraire , s'il le faut faire des critiques , cela sert de guide et de correction pour les écrivains , et pourquoi pas partager ses propres idées.Mis à part les francophones qui restent on n'a pas réussi à apprendre aux écoliers l'amour de la lecture mais ceci est un autre sujet.
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RépondreSupprimerLes commentaires sont destinés d’abord pour remercier ou critiquer les auteurs pour leurs contributions qui servent à enrichir l'histoire de leur propres pays , leur région ou leurs générations.Les dirigeants ont réussi dans leurs plans, arabiser pour mieux abrutir, isoler géographiquement et linguistiquement, et ainsi soumettre aisément ceux qu'on ne peut appeler citoyens mais en réalité des moutons de Panurge attendant que leur propre tour arrive pour l'échafaud.L'arabisation à outrance a réussi à créer des citoyens analphabètes trilingues qui ne connaissent même pas pas le chemin qu'ils empruntent , mais surtout l'aboutissement aveugle de leur destination.
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